Mon cher Victor,
Vendredi dernier, au réveil, je me suis tout de suite rendu compte qu'il serait difficile de tenir mon programme de mathématiques de la matinée. Ce n'est pas bien, ça, Mirabelle ! Je sais. Mais va savoir pourquoi, je n'ai pas culpabilisé...
Dehors, ma mère prenait le petit déjeuner sur la terrasse. Grand soleil. Et les petits oiseaux nous accompagnaient par leurs gazouillis... Je suis restée environ trois quarts d'heure à ne rien faire sur cette terrasse. A simplement bavarder avec ma mère. Nous avons ri des moineaux qui se poursuivaient les uns les autres. Reçu des brindilles sur le crâne aussi : la charpente de notre maison abrite un nid de volatiles fort sympathiques, et nous avions, au-dessus de nos têtes, le pépiement des petits en fond sonore, marquant les allées et venues de leurs parents, des vers de terre aux becs.
Notre jardin était plein de couleurs, ce matin-là. Des tulipes jaunes irisées de rose, des Coeurs-de-Marie qui portent si bien leurs noms... Des fourmis qui grimpaient sur mon plateau de petit-déjeuner, la folle escalade de l'une d'elle sur ma petite cuillère... Un rouge-gorge s'était posé sur la barrière, à quelques mètres de nous, nous l'avons admiré en silence... J'ai observé un ballet de bourdons, dans le pavé de fleurs...
Et puis soudain, je me suis aperçu que j'étais bien, là, au soleil, à contempler la nature et ses merveilles. Les rayons du soleil me caressaient la peau, le chant enjoué des oiseaux me mettait du baume au coeur... Il me semblait que le monde n'attendait que moi pour prendre toute sa dimension, et que bientôt, je ne formerais plus qu'un avec lui. Le concours, mes amours m'ont tout à coup paru sans importance, comparés à l'essence de la vie. Je me suis dit que c'était peut-être ça, le bonheur, tout simplement...
Pourquoi ce froncement de sourcils, mon Victor ? Tu m'avais habitué à des conversations bien plus noires que celle-ci, et je dois dire que je suis assez étonné de te voir si sereine, si... Epanouie ! Il est vrai que j'ai tendance à raconter mes petits malheurs plutôt que mes petits bonheurs. Alors, pour une fois, pourquoi ne pas se laisser aller au plaisir d'une si rare plénitude ? J'étais bien, ce matin-là, et j'avais pensé que peut être, tu serais heureux de partager ce bonheur tout simple avec moi ! Je le suis, en effet ! Et puis, cela fait du bien, un peu de légereté ! L'atmosphère de la blogosphère n'est pas franchement des plus optimistes en ce moment ! J'espère que ton article redonnera le sourire à tes lecteurs, au moins temporairement !