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Cher lecteur,

Exceptionnellement, nous nous adresserons à toi directement : ce site n'est en aucun cas une biographie de Victor Hugo. Alors si tu pensais trouver ici la vie de notre Totor national en long, en large, et en travers, passe ton chemin !

 

Pour bien comprendre les propos de nos deux protagonistes :

1° Des caractères gras de couleur bleue quand Victor s'adresse à Mirabelle

2° Une police des plus classiques quand Mirabelle s'adresse à Victor

 

Sur ce, bonne lecture !

 

Un Mot Au Vol ?

Papotage ArchivÉ

Opinion


Et si vous nous faisiez part de votre opinion ?

Victor mène l'enquête.

Parce que Mirabelle se le demande !




personnes ont écouté la conversation entre Mirabelle et Victor depuis leur rencontre.


Aujourd'hui, à :

il y a personne(s) qui papote(nt) avec Mirabelle et Victor.


La requête de Victor :

  • Parce que Mirabelle et moi-même aimons beaucoup de gens... Allez donc jeter un coup d'oeil à notre tour de tables !
 

Nos recommandations :

  • Un clic et vous y êtes... Si vous souhaitez quelques conseils pour guider votre lecture, bien entendu !



Lexique IUFMesque à l'usage des non-initiés :

  • Mirabelle, dans son infinie bonté, a daigné me proposer (ainsi qu'à toi, ô lecteur non affilié à l'Education Nationale !) un lexique de rattrapage, sensé me donner les repères indispensables à la compréhension de deux rubriques.


10 octobre 2007 3 10 /10 /octobre /2007 18:41

Ca

N'oublions pas le jour et l'heure. N'oublions pas l'odeur. N'oublions pas le soir, l'endroit. N'oublions pas le regard, les mains qui se frôlent et le frisson. N'oublions rien. Même dans les heures de doute. Même dans les heures de haine. N'oublions pas. Quand la mémoire nous joue des tours, quand on n'a plus les mots, quand il nous semble que cela ne sert à rien, quand il nous semble que c'est peine perdue, quand tout s'échappe, quand on en est à se demander pourquoi, encore, persister, il faut se souvenir. Se souvenir du jour et de l'heure. De l'odeur. De l'émerveillement. Il suffirait de presque rien. De fermer les yeux. Pour que tout revienne. Le frisson. La peur de rien. L'espoir. L'espoir irrépressible.
N'oublions pas pourquoi. N'oublions ni les mains moites ni le coeur qui bat. N'oublions pas ce qui nous a fait nous lancer dans l'aventure. C'est quand les souvenirs sont derrière soi que tout est perdu. C'est quand on n'est plus capable de chérir le bon que tout est perdu. C'est quand on ne se sert plus du passé pour embellir le présent que tout est perdu. L'amour se termine quand l'idéal n'existe plus.
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4 août 2007 6 04 /08 /août /2007 01:18
Assise sur son bureau (les maîtresses ne sont pas sensées s'asseoir SUR leur bureau, mais A leur bureau, quelque chose qu'il lui faudra encore cacher à l'Inspecteur...), elle attend le silence. Evidemment, Gontran, Aristide et Camille se donnent des coups de coude, évidemment, Laurent rit sous cape et chuchote le nom de Dimitri pour attirer son attention, évidemment seule Eliette est sage, comme d'habitude. Elle soupire. Fronce les sourcils. Se donne l'air de la méchante maîtresse qui va supprimer l'histoire de fin de journée parce que les enfants n'ont pas été assez gentils. Ils le savent, pourtant, que c'est l'heure de l'histoire. C'est comme ça tous les jours.
Elle attrape alors le bouquin posé sur son bureau. La fugue, d'Yvan Pommeaux. Après avoir étudié John Chatterton, détective avec eux, elle s'était dit que ce serait terminer la journée d'une bien belle façon que de lire un autre livre d'Yvan Pommeaux. Les jambes croisées, elle tient le livre sur ses genoux et prend un air sévère, en regardant les élèves un à un. Le tout, dans une classe, se dit-elle, ce n'est pas d'être sévère, c'est d'en avoir l'air. Instantanément (c'est toujours quelque chose qui l'amuse...), les regards se fixent sur elle. Jambes en tailleur. Dos droit. Attitude d'attention et de concentration. Quand elle saura que tout le monde est prêt, elle pourra parler. Elle ne dit toujours rien. Elle a remarqué plusieurs fois que se taire et attendre fait souvent bien plus d'effet que de se fâcher tout rouge. En tous cas, avec ces élèves là...
Elle entend des "Chuuuut, la maîtresse elle va lire l'histoire !", des : "Eeeeeeeh, j'la connais, j'la connais cette histoire !" et des "Moi aussi j'la connais ! Je l'ai à la maison ! C'est mon père qui me l'a achetée !". Elle réprime un sourire. Que j'aime ce métier...
Elle fait décrire la couverture aux élèves, les amène à identifier le titre, l'auteur et l'éditeur, à exploiter l'illustration en vue d'imaginer le thème de l'histoire. Ce n'est pas parce que c'est de la lecture-plaisir qu'on ne peut pas s'assurer de certains acquis, se dit-elle. Puis elle réalise qu'elle n'aime pas trop ce terme, lecture-plaisir. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela laisserait penser, à y regarder de plus près, que la lecture plus scolaire, telle qu'elle est pratiquée, avec étude de texte, correspondant au déroulement type d'une séance en classe de CE1, est dénuée de plaisir ? Cela signifierait-il que, parce que l'on "travaille", que la maîtresse pose des questions très précises et fait lire les enfants chacun leur ton, d'abord en déchiffrant puis en mettant le ton, on ne peut pas éprouver de plaisir ? Bon. Il faudra que je pense à un autre terme que lecture-plaisir..., se dit-elle.
Elle débute la lecture. Et là, c'est magique. Les gosses sont littéralement suspendus à ses lèvres. Vingt-six paires d'yeux sont braquées sur elle. Certains élèves ont la bouche ouverte, d'autres le buste penché en avant, comme pour plonger complètement dans l'histoire. Elle met le ton. Fait des grosses voix, des petites voix. Elle adore ça. Elle entend les rires des gosses, admire leurs mimiques joyeuses, le creusement de leurs fossettes. Elle entend les commentaires, chuchotés tout bas : "Oh, dis donc, elle lit bien la maîtresse...". Elle voit dans les regards combien c'est important, une maîtresse, dans la vie des enfants.
Elle continue de lire. Fait des pauses. Marque les silences. Elle aime les silences. Instants de suspense, où elle en profite pour les observer, un à un, avec une expression théâtrale. La lecture, au fond, c'est du théâtre. Elle veut que les mômes RESSENTENT l'histoire, qu'ils la VIVENT. C'est tellement beau, la lecture... C'est un tel voyage... On peut rester là, assis en tailleur dans la classe, dans une odeur de craie et de sueur (parce que les odeurs de classe, c'est beaucoup de sueur...), et soudain courir après Jules qui s'est échappé, fuyant une famille qu'il exècre. On peut courir après lui, comme des fous, craindre qu'il ne se fasse renverser par une voiture ou rattraper par son méchant maître.
- Il va mourir, Jules ?
- Mais non, il meurt pas. Mon père m'a déjà raconté l'histoire et en fait, à la fin, il...
- Mais euuuuuh ! Théophile ! Raconte pas l'histoire ! Y en a qui la connaissent pas ! Je vais le dire à la maîtresse !
Soudain, la sonnerie retentit. Certains, toujours les mêmes, se lèvent tels des ressorts, attrapent leurs cartables avec une poigne impatiente et vont se ranger frénétiquement devant la porte. Elle essuie le tableau. Rappelle à l'ordre les quelques énergumènes qui n'ont rien trouvé de mieux à faire que de faire rouler leurs billes aux quatres coins de la classe. Elle sait, en les voyant s'exciter, rire, se pousser, que l'instant de grâce est passé.
"Dis, maîtresse..."
Elle se retourne, tandis qu'elle autorise les élèves à sortir. Gontran lui jette un regard suppliant : "Dis, maîtresse... Est ce qu'on pourra la continuer demain, l'histoire ?"
Elle sourit, lui dit que oui, bien sûr, c'est prévu. Il a l'air rassuré. Il attrape son ballon de football, lance un "Au revoir maîtresse ! A demain !" à la cantonnade, et sort de la classe en hurlant : "Eeeeh, les gars ! Attendez-moi !".
Elle s'asseoit à son bureau. Elle a des corrections à terminer, et la classe à ranger un peu, comme tous les jours. Le sol est une véritable porcherie. Elle ne sait réellement pas comment ils se débrouillent. C'est d'un calme... Et comme tous les soirs, ce calme l'assaille elle aussi. Elle est épuisée. Véritablement épuisée. Le livre est resté ouvert sur son bureau. Elle le feuillette, pour le plaisir, bien qu'elle le connaisse déjà par coeur. Elle a hâte d'être à demain, pour continuer l'histoire. Et toucher de nouveau un instant de grâce...
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25 juillet 2007 3 25 /07 /juillet /2007 04:12
Il y avait la pluie et le tonnerre. Le duvet humide. L'odeur un peu moisie de la tente. Les rires, les cris, la musique dehors. La fatigue, les yeux qui piquent. Mes pieds tout froids et les éclairs. Je ne parvenais pas à trouver le sommeil. Comme si j'attendais quelque chose. Ou quelqu'un. Cette nuit de 14 juillet me rappelait celle de mes huit ou neuf ans. Un été, des vacances avec mes parents et ma meilleure amie. Un orage terrifiant, comme celui-là. La même peur : une peur de petite fille.
J'étais seule dans ces deux duvets convertis en un seul. A deux doigts de glisser du matelas pneumatique, seule à maudire cette fichue idée de camping. Je ne parvenais pas à trouver le sommeil. Une heure a dû s'écouler, dans la torpeur, dans la nervosité et l'épuisement. De ces instants où le temps nous échappe un peu, où on bascule vers un nulle part, où on n'a plus qu'une vague conscience de qui on est et d'où on se trouve, comme dans du coton.
Et puis, dans le bruissement de l'herbe, j'ai entendu le gémissement de la fermeture éclair, distingué la lueur d'une lampe de poche. Entrevu une silhouette familière. Il est entré dans la tente, a retiré ses chaussures. Il s'est couché à côté de moi, dans ces deux duvets convertis en un seul. Il m'a prise dans ses bras. M'a dit de ne pas m'en faire, et de dormir. Et moi, j'ai béni la vie de m'avoir offert cet orage et cette sensation étrange : celle de ne manquer de rien.
J'ai vraiment vécu ça. Un orage terrible, ses bras autour de mon visage, ses lèvres sur mon front, et l'impression que rien ne pourrait m'arriver, que rien ne pourrait nous arriver.
Si la vie est difficile, si l'amour est compliqué, si un jour tout peut être bleu et le lendemain gris, il y a quelque chose dont je suis absolument certaine, malgré le doute et les épreuves... C'est qu'il y a des instants qui valent la peine qu'on s'en souvienne.
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7 juin 2007 4 07 /06 /juin /2007 19:44
Elle voulait être de ces femmes qu'on idôlatre. De ces femmes  qui déchaînent passions et coeurs, qui  vivent au présent. Elle voulait  être aimée, adorée, admirée. Elle voulait qu'on l'aime. Elle voulait faire partie de l'autre. Elle voulait  "représenter tout", "être la femme idéale", être indispensable. Elle voulait qu'on l'ait dans la peau. Elle voulait qu'on l'aime. Vraiment. Elle voulait être tout. Pas de juste milieu. Pas d'indifférence. Non. De la passion. Des sentiments exacerbés.
Elle voulait se sentir belle. Se sentir femme. Elle qui n'était jamais considérée que comme l'"intelligente", celle qui impressionne par son esprit, jamais par sa beauté. Elle voulait qu'on l'aime. Qu'on la désire. Qu'on l'épouse. Qu'on lui fasse un enfant. Qu'on s'engage avec elle, avec confiance, sans méfiance. A corps perdus.
Elle voulait exister. Exister dans ses yeux. Y voir quelqu'un de bien, y voir quelqu'un de beau. Se voir belle, se voir bien. Se voir aimée. Elle n'était qu'intelligente. Quand lui avait-on dit qu'elle était belle ? Belle... Sa soeur l'était. Pas elle. A croire que les gens entraient dans des cases et qu'ils y restaient. Elle ne serait jamais belle. Toujours intelligente. Toujours brillante. Mais jamais belle.
Elle voulait être aimée, comme elle l'aimait, lui. Sauter dans un train et aller le rejoindre, en se disant qu'il serait heureux. Ne pas être déçue, encore, toujours. Ne pas s'apercevoir que l'amour peut être raisonnable et raisonné. Ne pas attendre le bon moment. Le créer. De toutes pièces.
Elle n'était pas de celles qui méritent d'être aimées. Trop communes. La cuisse un peu fade, le teint un peu pâle, l'oeil sans éclat. La chair un peu flasque. Elle se dégoûtait suffisamment elle-même pour ne pas comprendre qu'elle n'avait aucun attrait. Elle avait eu très tôt conscience de cette faiblesse. Avait tout rattrapé sur l'impertinence, l'humour carnassier, le parcours scolaire parfait. Elle s'était dit... Elle s'était dit que, peut être, on l'aimerait pour ça... Elle l'avait cru, oui.
Mais le manque était là. Elle n'était pas belle. On ne l'idôlatrait pas, on ne l'adorait pas, on ne l'admirait pas. Pas même lui. Elle ne faisait pas partie de lui. Ne représentait pas tout pour lui. A aucun moment n'était la femme idéale. Elle n'était pas indispensable et il ne l'avait pas dans la peau. Elle était, au contraire, dans le très juste milieu. 
Pourquoi elle ? Pourquoi moi ?, se disait-elle. Et elle allait pleurer, doucement, tandis qu'il l'accusait encore d'une "crise à deux balles". Alors qu'elle était si malheureuse, si profondément malheureuse... Elle n'était peut être pas belle, elle ne méritait sans doute pas d'être aimée, mais lui, lui, il était aveugle, complètement aveugle, ne voyait rien de rien. Et ce n'était pourtant pas le fait de l'amour...

 

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17 mai 2007 4 17 /05 /mai /2007 08:53
C'est sa première fois. Elle a les mains moites et le coeur qui bat. Vite. Fort. Le réveil fluorescent jette sur son corps d'homme une lumière presque surnaturelle. Il retire sa chemise. Elle voit ses muscles se contracter. Il est beau. Il est fort. Il a l'air d'un homme. C'est un homme.
C'est sa première fois. Il l'embrasse dans le cou. Jamais personne ne l'avait embrassée dans le cou. Doux frisson qui la parcoure. Elle frôle son torse velu, n'ose pas le regarder. Se détendre. Ne pas avoir peur. Je me souviendrai toute ma vie de ma première fois... L'obscurité de la chambre la rassure. Elle ne veut pas qu'il voit son petit bedon, son vieux soutien-gorge et encore moins ses quelques boutons d'acné dans le dos. Et s'il réalisait soudain qu'elle n'était pas désirable ?
C'est sa première fois. Elle avait enlevé son tee-shirt sans réfléchir. Pas le temps de réaliser. Je suis en train de vivre l'un des instants les plus inoubliables de mon existence... Elle ne l'aime pas. Pas encore. Elle écoute ce désir. C'est un homme. Encore jeune fille, elle est presque une femme. Elle a peur. Elle est au bord d'un précipice. Quand elle aura plongé, la tête la première, elle ne sera plus jamais la même.
Il halète. Mon dieu, je n'avais pas imaginé que le désir masculin était si pressant ! Il se débat avec la fermeture éclair de son jean. Bien loin de la faire rire, cette situation l'affole. Elle aurait presque envie de reprendre tee-shirt, escarpins et sac besace et de s'enfuir comme une voleuse. Est-elle prête ? Elle l'ignore. Que signifie "être prête" ? Elle réfléchissait à cela tandis qu'il l'embrassait, furieusement, fougueusement. Que signifie "être prête" ?
Elle sent ce sexe chaud et dur tout contre elle. Elle n'ose pas regarder. Elle n'ose pas toucher. Elle n'ose rien, de toute façon. Elle se laisse faire. Le laisse faire d'elle ce qu'il veut. L'observe. S'observe elle-même. Rentre le ventre. Ferme les paupières, de temps en temps, tend ses lèvres. Comme dans les films. Il lui caresse les cheveux. Brutalement et délicatement à la fois. Elle a envie de lui dire, soudain : "Est-ce que tu te rends compte que je me souviendrai de toi toute ma vie, que tu auras toujours un goût spécial, celui de ma première fois ?". Elle se retient. Mais le pense très fort.
C'est sa première fois. Elle ne pense qu'à ça. Le devine-t-il ? Ses mains la touchent, partout, intimité consentante et pétrifiée. Elle ne contrôle rien. Elle assiste, impuissante, à sa propre métamorphose. Il déchire l'emballage du préservatif. Elle est gênée par ce temps mort, par le bruissement de l'emballage, par le glissement du latex, par ses soupirs impatients.
Il vient en elle, ça y est. Elle a mal. Une douleur vive et rapide. Elle imagine un drap qui se déchire. Elle se retient de crier. Le réveil fluorescent indique 23 h 30. Elle est allongée là, dans ce grand lit. Elle est dans ses bras d'homme, serrée contre son corps d'homme. Elle est enfin une femme.
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28 avril 2007 6 28 /04 /avril /2007 20:27
Elle lui manquait encore, parfois. Quand tout allait mal. Et que l'instinct lui criait de l'appeler. Alors elle se souvenait de cette rupture. Son numéro, toujours en tête, toujours dans le répertoire. Il aurait été si simple de le composer... Il faudrait alors se confronter à la réalité. Au refus. Et elle ne voulait pas de cette confrontation.
Quand tout allait mal, elle lui manquait encore, parfois. Son humour noir lui manquait. Son rire lui manquait. Ses chansons d'Higelin lui manquaient. Toujours une pensée pour elle quand elle entendait "Champagne" à la radio. Sa voix grave lui manquait. La simple idée qu'elle était là, toujours, en toile de fond, lui manquait.
Il aurait été si simple de composer son numéro. Mais si douloureux aussi. Alors elle gardait ses souvenirs. Y repensait, comme une vieille femme au coin de son feu, son tricot sur les genoux. Pour lui tenir chaud. Les rires. Les lettres enflammées à des inconnus entrevus dont elles s'étaient amourachées. Les déceptions aussi. Le vélo en Italie. Les nuits blanches à parler. Les soirées pyjamas improvisées.
Quand tout allait mal, son prénom lui revenait, toujours. Envie de la voir. Pour être plus légère. Dédramatiser. Rire dans le bordel de sa chambre. Ecouter Téléphone. Prendre un thé dans la cuisine. Faire un pain de thon. Courir après le chat et gagatiser, en la faisant rire, parce que ça l'amusait toujours, quand elle gagatisait devant le chat. Prendre des nouvelles de sa famille, qu'elle aimait bien.
Mais elle ne composait pas son numéro. Elle ravalait le manque. Ca passerait, tôt ou tard. Et elle se disait que finalement, l'amitié, ce n'était pas si différent de l'amour. Pour la préserver, pour la chérir au fond de soi, on ne l'abandonne jamais complètement. On l'idéalise. On la tourne en nostalgie. En regrets. Oui décidemment, l'amitié, ce n'était pas si différent de l'amour.
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22 avril 2007 7 22 /04 /avril /2007 11:47
Elle avait voté. Le bureau de vote était plein à craquer. Toutes les générations. Elle avait discuté avec une petite grand-mère derrière elle : "Je suis bien contente de voir que les jeunes se réveillent !". Une petite fille courait partout, posait des questions, sous l'oeil amusé de son papa : "Et les papiers, ils servent à quoi ? Et pourquoi y'a des cabines ?". Elle furetait, passait sous les rideaux, éclatait de rire. Alors que la jeune fille était dans l'isoloir, pliant son bulletin, une voix s'enquérit : "Euh... Mademoiselle, excusez-moi, mais est-ce que par hasard il n'y aurait pas une carte d'électeur dans l'isoloir ?". La jeune fille avait ri et tendu la carte sous le rideau. Elle était  heureuse, ce matin. On était serré, dans ce petit bureau de vote, on faisait la queue, on n'avait pas la place pour accéder aux enveloppes et aux bulletins. Et il n'y avait jamais eu une telle attente ! Et jamais un tel... Souffle d'espoir. Jamais elle n'avait constaté une telle atmosphère. Comme si les gens se respectaient. Comme s'ils formaient un tout. Comme une joie de vivre, communicative, positive, une confiance en l'avenir et en l'être humain.
Elle croisa des gens. Des gens venus voter en masse. Elle leur sourit. Et si le monde changeait ? Elle était bien, ce matin. Elle se sentait portée. Portée par le soleil, venu les inonder de lumière, en ce jour d'élections présidentielles.  Portée par l'espoir. La participation, apparemment, était élevée dans les DOM-TOM. Certaines mairies rurales étaient débordées de monde. Parfois, une heure de queue pour parvenir à mettre son bulletin dans l'urne ! Et si le monde changeait ?
Ne plus écouter sa tête. Ecouter l'espoir, seulement l'espoir. Tant pis si cet espoir ne les mènerait nulle part, tous. Tant pis. En attendant, elle était là, au soleil. Le coeur battant. Avec le sentiment d'écrire l'histoire, à sa manière. Avec le sentiment que tout allait s'arranger. Elle profiterait de cet instant, où rien n'a encore basculé. Elle profiterait de cette incertitude pour chérir son rêve, encore un peu, juste un petit peu. Elle profiterait de cette journée, de ce magnifique dimanche, de ce soleil, des oiseaux, du ciel bleu, pour y croire, encore. La déception viendrait, sans doute, vers 20h. Mais il était si bon de se laisser aller à l'espoir, à l'idéal.
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18 avril 2007 3 18 /04 /avril /2007 08:50
Fraîchement rentré du travail, il avait pu constaté qu'elle avait pris toutes ses affaires. Toutes. Plus rien dans la penderie. Plus de sac à main dans l'entrée. Plus de crème hydratante dans la salle de bain. Plus rien. Il se laissa lourdement tomber sur son fauteuil : pourquoi ? Le manqua lui attrapa le ventre et le lui tordit dans tous les sens. Il avait mal. Elle n'avait pas pu partir. Non. Elle n'était pas partie. Elle allait revenir. Elle revenait toujours.
Il composa son numéro sur son portable. Fébrile, le coeur battant. Sonnerie dans le vide. Réponds, s'il te plaît, réponds... Ne pas s'énerver, surtout. L'amadouer. Et la faire revenir. A tout prix. Sonnerie dans le vide. Il raccrocha rageusement et recommença. Ne pas se décourager. Elle finirait par répondre. Elle ne pouvait pas se passer de lui, de toute façon. Ne lui avait-elle pas dit qu'il était l'homme de sa vie ? On ne peut pas dire ce genre de choses et s'enfuir le lendemain. Sonnerie dans le vide. Les crampes dans le ventre s'accentuait. Il avait peur.
Quelque chose est cassé... lui avait-elle dit, un jour, après une grosse dispute à propos de leur avenir commun. Ca lui passera, s'était-il dit. Elle passait l'éponge sur tout, une fois qu'elle s'était calmée. Pardonnait tout. Elle lui pardonnerait toujours tout. Quelque chose est cassé... Et si, cette fois-ci, quelque chose s'était réellement brisé en elle ? Si elle ne revenait pas ?
Il ne l'avait pas assez écoutée, pas assez comprise. Et si c'était trop tard ? Mais elle l'agaçait tellement, avec ses reflexions incessantes, que désormais elle l'énervait rien qu'en ouvrant la bouche ! Referme bien le dentifrice, ne déjeune pas debout, tu manges trop de bonbons, tu sales trop tes aliments, enlève tes chaussures dans l'entrée... Tu es trop ci, trop ça, pas assez ci, pas assez ça... Elle l'agaçait, elle l'agaçait, il n'avait donc rien à regretter !
Pourtant, il composa son numéro. Encore. Toujours cette même sonnerie dans le vide. Imperturbable. A se cogner la tête contre les murs. Et s'il n'avait pas vu ses blessures ? Et si c'était de sa faute ? Il se rongeait les ongles. Si elle avait été là, elle lui aurait pris la main et dit d'arrêter. Où était-elle ? Elle avait dû prendre le premier train et rentrer chez elle. Mais pas un mot. Pas une explication. Ca ne lui ressemblait pas. D'habitude, elle laissait toujours une longue lettre, très romantique, ou elle expliquait le pourquoi du comment cela n'allait plus. Aujourd'hui, rien. L'absence. Et l'angoisse de pas savoir.
Qu'avait-il bien pu dire ? D'accord, hier, pendant le repas, il lui avait dit qu'elle n'était pas la femme de sa vie. Elle avait été chercher il ne savait trop quoi dans la cuisine, et quand elle était revenue s'asseoir, elle avait l'air... Triste. Les yeux un peu rouges, peut être, à bien y réfléchir. Elle n'avait pourtant pas pipé mot, il n'avait rien remarqué. Ce n'était pas grand chose, tout de même, d'avoir dit ça !
Et puis, ce n'est pas ce qu'il voulait dire. Elle avait mal compris. Il l'aimait. Vraiment. Il l'aimait, elle. Jamais il ne resterait s'il ne pensait pas qu'ils pouvaient construire quelque chose ensemble. Alors quoi ? Elle prenait toutes ses paroles au pied de la lettre ! Elle créait les problèmes !
Sonnerie dans le vide. L'idée le frôla de prendre la voiture et de rouler comme un fou sur l'autoroute pour la rejoindre chez elle, à deux cents kilomètres d'ici. En roulant à 150 km/h, cela irait vite. Et elle serait touchée. Elle savait bien que ses preuves d'amour étaient dans les actes. Car il n'était pas doué pour les mots. Vraiment pas doué.
Souvent, ils se disputaient parce qu'il s'exprimait mal. Malentendus éclaircis à force de discussions prise-de- tête. Elle insistait, insistait, lui disait de faire ses efforts sur son langage. Mais qu'y pouvait-il ? Les mots sortaient comme ça, sans crier gare, sans même qu'il s'en rende vraiment compte ! Si elle ne le comprenait pas, il n'y pouvait rien, lui ! Et si elle ne revenait pas ?
Il n'imaginait pas sa vie sans elle. Même si elle était chiante. Même si elle donnait des leçons. Même si elle le critiquait sans arrêt et que rien ne trouvait jamais grâce aux yeux de Mademoiselle Parfaite. Mais il l'aimait. C'était une évidence. Il n'avait jamais cessé d'être amoureux. Jamais. Elle lui avait dit un jour que l'amour ne règle rien... Allait-elle revenir ? Et ce téléphone, qui sonnait toujours dans le vide ! Pourquoi ne répondait-elle pas ?! Ca l'amusait, de le laisser sans nouvelles, à se ronger les sangs ?
Il avait été con, aussi. On ne peut pas dire n'importe quoi, n'importe comment, n'importe quand. Le problème, c'est qu'il ne s'en apercevait que maintenant. Quand elle était partie. Il fallait toujours qu'elle parte pour qu'il ouvre les yeux sur sa bêtise.
Sonnerie dans le vide.
Elle reviendrait.
Elle reviendrait.
Forcément.
Elle l'aimait, ne pouvait pas vivre sans lui. Il avait eu des paroles malheureuses, d'accord, mais tout s'oublie. Elle tournerait la page et reviendrait. Tout rentrerait dans l'ordre, bientôt. Il soupira et alla se chercher une bière dans le frigo. Il garda son téléphone dans sa poche, au cas où elle appellerait.
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16 avril 2007 1 16 /04 /avril /2007 02:44
Elle l'avait quitté, cet après-midi. Elle avait récupéré ses affaires. Pris le train. Et elle était partie. Sans un mot, sans une explication, profitant de son absence. Aveu de faiblesse. Inévitable. Tu n'es pas la femme de ma vie... Alors elle avait pris le train. Sans un mot. Sans une explication. Parce que le rêve s'était brisé, net. A quoi bon faire semblant ?
Elle regardait défiler les paysages. Son portable vibrait dans sa poche. Comédie classique d'une histoire à l'agonie. Elle ne répondit pas. A quoi bon faire semblant ? Il lui aurait dit qu'il l'aimait, qu'elle lui manquait trop. Il aurait gémi. Elle n'était pas dupe. Il l'aimait quand elle fuyait. Jamais quand elle était là, discrète, patiente. Jamais vraiment. Ou... Mal. Il l'aimait mal.
Elle n'aurait pas pu le lui dire en face. Les mots se seraient cassés dans sa gorge. Trop définitifs. Des mots qui font peur. L'impression de se précipiter dans le vide. Ne pas avoir le choix.
Tu n'es pas la femme de ma vie... Entre le fromage et le dessert. Comme de la pluie et du beau temps. Elle avait ravalé ses pleurs. Prétexté qu'elle allait chercher le poivre pour aller sangloter dans les toilettes. Se cacher. Se dire que c'était ça, au fond, leur histoire : être condamnée à pleurer, seule, dans les toilettes... Alors elle avait pris sa décision. Elle allait le quitter. Elle s'était rassise avec un sourire figé, tandis qu'il lisait le journal et commentait les derniers résultats de football, sans deviner le moins du monde quel impact avait eu cette simple phrase sur sa compagne. Il l'avait perdue.
Les paysages défilaient, dans une sorte de continuité changeante. Elle se dit qu'au fond, c'était ça, la vie. Défiler à toute vitesse et changer de paysages, tout en tentant de conserver une certaine cohérence. Un semblant d'harmonie entre les couleurs. Son portable recommença à vibrer dans sa poche. Il insisterait jusqu'à ce qu'elle réponde. Elle ne décrocherait pas. Cela aurait été comme avouer sa faiblesse. Sa dépendance. Le manque. La résignation.
Tu n'es pas la femme de ma vie... Le ton était clair, anodin. Elle avait compris qu'il se contenterait de cette médiocrité. D'elle, comme d'un meuble, comme d'un prix de consolation. Symbole de renoncement, renoncement à ses rêves de grand amour. Il était prêt à accepter une relation tranquille, sans passion, bercée par la télévision, les courses, le ménage. Tout en sachant qu'elle n'était pas la femme de sa vie. Pourquoi une telle contradiction ?
Alors elle avait pris le train. Elle était partie. Avec encore au ventre un rêve de mieux. Et aussi la douleur de l'aimer encore. Tu as brisé mes rêves, lui avait-il dit un jour. Il y a longtemps. Pourtant, il était resté. Pourquoi rester sans rêve ?
Le téléphone vibrait encore dans sa poche. Elle eut envie de pleurer, tout à coup. Elle se revit, elle le revit. Jeunes amoureux. Seuls au monde. A se découvrir. Tu es parfaite, lui avait-il dit, un soir, tandis qu'il caressait ses courbes, serré tout contre elle. Avoir un enfant de toi ne me déplaîrait pas... Où était donc cet homme ? Qu'étaient devenus ces mots, ces mots d'amour absolus, tendres, pudiques, sincères ?
Elle était là, dans ce train, recroquevillée sur la banquette. Et le téléphone sonnait toujours. Elle avait envie de pleurer. Parce qu'elle l'aimait toujours. Pourquoi les femmes sont-elles si faibles ?
Il faudrait tenir. Résister. Jusqu'à ce que le temps panse les plaies. Jusqu'à ce qu'elle cesse de l'aimer.
Elle entendit le contrôleur annoncer le terminus.
Alors elle descendit.
Tu n'es pas la femme de ma vie...
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4 avril 2007 3 04 /04 /avril /2007 04:08
La maman de Germain m'a ramenée plus tôt à la maison. Elle a dit que c'était Papa qui voulait, qu'il avait téléphoné. Moi, je ne voulais pas, on s'amusait bien avec Germain, on jouait au foot dans son jardin. Mais il a fallu que je rentre, la maman de Germain a insisté et elle avait une drôle de tête.
La maman de Germain m'a accompagnée dans le salon, en me serrant fort la main. Puis elle a serré celle de Papa et elle lui a dit tout un tas de choses à l'oreille, en m'écartant d'elle. Elle faisait une drôle de tête, la maman de Germain. Papa arrêtait pas de la remercier, de s'excuser. Il avait les yeux tout rouges, comme quand il a épluché des oignons pour faire la tartiflette. La maman de Germain est partie. Elle m'a fait un gros bisou et m'a appelée "ma pauvre chérie".
Papa m'a laissée comme ça. Il ne m'a même pas fait de bisou et il ne m'a pas répondu quand j'ai demandé si on pouvait faire du vélo au bois. Il est monté en disant qu'il "allait voir Maman et qu'il fallait qu'ils me parlent tous les deux quand Maman serait sortie.". J'ai voulu aller faire un câlin à Maman mais Papa n'a pas voulu. Il m'a dit de rester en bas. Alors j'ai été jouer, j'ai pris le hochet de Auguste même si j'ai pas le droit, parce que moi, normalement, je ne suis plus un bébé. De toute façon, Papa est en haut avec Maman. Et Auguste est chez la nounou, il n'y avait pas son transat dans l'entrée.
J'ai pris le hochet de Auguste et mon Action Man. On aurait dit que le hochet d'Auguste, c'était le vaisseau de Action Man. Là-haut, j'entends Papa... "Chérie, ouvre, s'il te plaît...". J'entends comme si on cognait à la porte. Et puis Papa qui s'énerve. J'ai un petit peu peur. Papa ne s'énerve jamais sur Maman, d'habitude. Alors je suis montée. Il y avait Papa contre la porte. Il pleurait. Je n'avais jamais vu Papa pleurer. Il s'essuyait sur son pull rouge, celui que Maman aime bien. Il y a une grosse tache dessus. Auguste a vomi dessus ce matin. Maman ne l'a pas disputé. Auguste ne se fait jamais disputer. C'est parce que c'est un bébé et qu'il ne comprend pas. C'est ce que dit Papa.
" Redescends Claire...", me dit Papa.
- Qu'est-ce qu'elle fait, Maman ?
- Redescends, je te dis.
- On peut aller faire du vélo au bois ?
- Tu vas redescendre, oui ou non ? Merde à la fin !
J'ai sursauté. Papa m'a dit pardon et m'a pris dans ses bras. Il a dit que "Papa disait n'importe quoi". Il m'a serrée très fort, en pleurant. J'ai rien compris. Il m'a dit d'aller dans ma chambre. Mais je suis restée. Il cognait contre la porte, maintenant, en hurlant qu'il fallait que Maman sorte. Que ça n'allait rien changer. J'ai entendu Maman pleurer aussi dans la chambre. Alors je me suis mise à pleurer aussi.
"Anne, ta fille pleure..." a dit Papa, "Il faut que tu sortes... S'il te plaît... Ca ne changera rien... S'il te plaît... J'ai besoin de toi... Ne te renferme pas... Pense à ta fille..."
Alors Maman a fini par sortir. Elle était toute bouffie. Les yeux tout rouges, encore pire que quand on a épluché les oignons. Elle avait le hoquet, comme Auguste après le biberon. Elle m'a pris dans ses bras et m'a serrée. Mais ça me faisait mal alors je lui ai dit d'arrêter, mais elle a continué. Elle a dit pardon, qu'elle m'aimait, et elle m'a dit de descendre ma chérie, qu'elle allait faire des crêpes pour mon goûter. Moi j'adore les crêpes, alors je suis descendue tout de suite.
Papa est descendu aussi et il a appelé Mamie. Il a encore pleuré. J'ai voulu parler à Mamie et lui dire que j'allais manger des crêpes mais il n'était pas d'accord. Il a dit que je verrais Mamie dans quelques jours. De pas m'inquiéter. Maman faisait les crêpes. Elle avait mis la musique, "pour faire plus gai". Moi je dansais, j'aime bien, mais Maman elle avait l'air encore triste. Je ne sais pas pourquoi.
On a fait sauter les crêpes. J'en ai raté une et Maman s'est fâchée très fort, mais elle s'est excusée tout de suite, en disant que c'était pas de ma faute. Maman a mis trois assiettes et on a mangé les crêpes. Il y avait du Nutella. J'ai eu le droit de prendre autant de crêpes que je voulais, et Maman n'a pas fait d'histoires quand j'ai voulu lécher la cuillère. J'avais plein de chocolat autour de la bouche, ça m'a fait rire, et Maman m'a appelée son "petit chat". J'ai rigolé. Et puis j'ai demandé :
"Où est-ce qu'il est Auguste ?"
Maman s'est mise à pleurer. Elle est montée dans sa chambre en courant. Et Papa m'a pris sur ses genoux en disant qu'il fallait qu'il me parle. Que j'étais grande et que je pouvais comprendre que parfois, la vie nous fait du mal.



Merci à Plum', dont le texte m'a inspirée.

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